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Mais, circonstance terrible, Harry, en brandissant son cou-
teau pour frapper l oiseau, avait entamé la corde, dont un toron
était maintenant coupé.
Les cheveux d Harry se dressèrent sur sa tête.
La corde cédait peu à peu, à plus de cent pieds au-dessus
du fond de l abîme !&
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Harry poussa un cri désespéré.
Un second toron manqua sous le double fardeau que sup-
portait la corde à demi tranchée.
Harry lâcha son couteau, et, par un effort surhumain, au
moment où la corde allait se rompre, il parvint à la saisir de la
main droite au-dessus de la section. Mais, bien que son poignet
fût de fer, il sentit la corde glisser peu à peu entre ses doigts.
Il aurait pu ressaisir cette corde à deux mains, en sacrifiant
l enfant qu il soutenait d un bras& Il n y voulut même pas pen-
ser.
Cependant, Jack Ryan et ses compagnons, surexcités par
les cris d Harry, halaient plus vivement.
Harry crut qu il ne pourrait tenir bon jusqu à ce qu il fût
remonté à l orifice du puits. Sa face s injecta. Il ferma un instant
les yeux, s attendant à tomber dans l abîme, puis il les rouvrit&
Mais, au moment où il allait lâcher la corde, qu il ne tenait
plus que par son extrémité, il fut saisi et déposé sur le sol avec
l enfant.
La réaction se fit alors, et Harry tomba sans connaissance
entre les bras de ses camarades.
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CHAPITRE XV
Nell au cottage
Deux heures après, Harry, qui n avait pas aussitôt recouvré
ses sens, et l enfant, dont la faiblesse était extrême, arrivaient au
cottage avec l aide de Jack Ryan et de ses compagnons.
Là, le récit de ces événements fut fait au vieil overman, et
Madge prodigua ses soins à la pauvre créature, que son fils ve-
nait de sauver.
Harry avait cru retirer un enfant de l abîme& C était une
jeune fille de quinze à seize ans, au plus. Son regard vague et
plein d étonnement, sa figure maigre, allongée par la souffrance,
son teint de blonde que la lumière ne semblait avoir jamais bai-
gné, sa taille frêle et petite, tout en faisait un être à la fois bi-
zarre et charmant. Jack Ryan, avec quelque raison, la compara à
un farfadet d aspect un peu surnaturel. Était-ce dû aux circons-
tances particulières, au milieu exceptionnel dans lequel cette
jeune fille avait peut-être vécu jusqu alors, mais elle paraissait
n appartenir qu à demi à l humanité. Sa physionomie était
étrange. Ses yeux, que l éclat des lampes du cottage semblait
fatiguer, regardaient confusément, comme si tout eût été nou-
veau pour eux.
À cet être singulier, alors déposé sur le lit de Madge et qui
revint à la vie comme s il sortait d un long sommeil, la vieille
Écossaise adressa d abord la parole : « Comment te nommes-
tu ? lui demanda-t-elle.
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Nell13, répondit la jeune fille.
Nell, reprit Madge, souffres-tu ?
J ai faim, répondit Nell. Je n ai pas mangé depuis& de-
puis& »
À ce peu de mots qu elle venait de prononcer, on sentait
que Nell n était pas habituée à parler. La langue dont elle se ser-
vait était ce vieux gaélique, dont Simon Ford et les siens fai-
saient souvent usage.
Sur la réponse de la jeune fille, Madge lui apporta aussitôt
quelques aliments. Nell se mourait de faim. Depuis quand était-
elle au fond de ce puits ? on ne pouvait le dire.
« Combien de jours as-tu passés là-bas, ma fille ? » de-
manda Madge.
Nell ne répondit pas. Elle ne semblait pas comprendre la
question qui lui était faite.
« Depuis combien de jours ?& reprit Madge.
Jours ?& » répondit Nell, pour qui ce mot semblait être
dépourvu de toute signification.
Puis, elle secoua la tête comme une personne qui ne com-
prend pas ce qu on lui demande.
Madge avait pris la main de Nell et la caressait pour lui
donner toute confiance :
13
Nell est un abréviatif de Helena.
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« Quel âge as-tu, ma fille ? » demanda-t-elle, en lui faisant
de bons yeux, bien rassurants.
Même signe négatif de Nell.
« Oui, oui, reprit Madge, combien d années ?
Années ?& » répondit Nell.
Et ce mot, pas plus que le mot « jour », ne parut avoir de
signification pour la jeune fille.
Simon Ford, Harry, Jack Ryan et ses compagnons la regar-
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